C’est un lieu chargé d’histoire avec des vitraux exceptionnels

Trop peu connu des hautmontois, c’est un peu comme les Parisiens qui ne sont pas, non plus, les premiers à visiter la Tour Eiffel qu’ils ont sous leurs yeux tous les jours, l’endroit est prêt à dévoiler ses trésors : ses vitraux réalisés par Auguste Labouret, célèbre maître-verrier. 

L’histoire de la chapelle Saint-Eloi

A la fin des années 40, le quartier du Bois-du-Quesnoy n’a rien perdu de sa vitalité d’avant-guerre. Son développement économique et industriel s’amplifie sous le poids des nombreuses usines implantées dans la commune. Les ouvriers de ces entreprises et leurs familles vivent pour la plupart dans des conditions terribles, les foyers étant totalement insalubres. Ainsi, pour satisfaire une population ouvrière majoritaire, la SA d’Habitation à Bon Marché décide-t-elle de mettre en place un projet de construction de logements sociaux. Le programme de construction de la Cité du Bois du Quesnoy ou Cité Saint-Eloi prend place dans cette perspective. Il démarre en 1948. Confié à l’architecte suisse roman, Denis Honegger, le projet initial prévoit des habitations avec un certain confort pour l’époque. De plus, pour le bien-être des habitants, l’architecte a prévu la construction d’un parc, d’établissements scolaires et de bâtiments sociaux. Une chapelle est également construite dans ce quartier au milieu de lotissements de l’avenue du Général Leclerc et dédiée à saint Eloi, le saint patron des métallurgistes. La chapelle Saint-Eloi, oeuvre de l’architecte Denis Honegger, a été édifiée de 1958 à 1960, sous l’égide de l’archevêque de Cambrai. Il fit appel aux Fils de la Charité, qui ont déjà travaillé dans les banlieues ouvrières de Paris et de France. Derrière la façade nord, se trouvent la sacristie, entre l’église et les salles paroissiales, au-dessous du clocher, et une salle intitulée le « foyer du public ». L’église possède également un sous-sol pour permettre l’aération. Le bâtiment accueillait un  « Foyer du Public » censé réunir en son sein les habitants de la cité.

Treize vitraux représentant des scènes importantes de l’existence de Saint-Eloi décorent l’intérieur de la chapelle

Commandés en 1959 par l’archevêque de Cambrai à l’atelier du maître verrier Auguste Labouret, d’après des cartons du peintre Emilio Beretta, ces vitraux sont l’oeuvre majeure de la chapelle. Pour leur réalisation, Labouret a fait appel à la technique dite du vitrail en dalles taillées enrobées de ciment armé dont il est l’inventeur. Le maître-verrier a utilisé un verre très épais, de différents coloris, fabriqué aux Glaces de Boussois, de manière artisanale. Ces dalles de verre ont ensuite été incrustées dans le béton. Cette technique du vitrail est exceptionnelle. Le rendu remarquable offre un festival de couleurs. La manière qu’a ici l’artiste d’appréhender l’élaboration des vitraux peut se rattacher à la technique des papiers découpés dont le grand maître est surtout Henri Matisse. Cette référence aux papiers découpés se retrouve majoritairement dans le traitement des tissus et des corps. Cette atmosphère, Labouret, s’est plu à la décrire :  « le secret de l’ambiance (…), c’est la lumière, répartie avec discernement. L’église évite de lasser les yeux du priant et l’aide à trouver sa lumière intérieure, en l’isolant de la vue extérieure. Commettre une erreur de goût ou de rythme dans l’ensemble de cette atmosphère ou dans ces détails, c’est enfreindre les lois d’harmonie universelles ». Cette harmonie à respecter, passe par le traitement de la lumière qui est l’âme du vitrail. Cet aspect lyrique est également exprimé par Labouret : « la couleur c’est la symphonie, la forme c’est la mélodie ».
Odile Hazebroucq, membre de la « Mémoire d’Hautmont et de ses environs » précise : « Auguste Labouret, le créateur de ces vitraux, est un grand artiste. C’est un orfèvre en matière de vitraux, mais aussi de mosaïques. Il en a réalisé partout en France mais aussi au Canada. Il reste trop méconnu mais il mérite toute notre reconnaissance, car son travail est exceptionnel ».

Mais que racontent les vitraux? C’est un programme iconographique complet qui avait été commandé par le diocèse de Cambrai pour cette chapelle dédiée, afin d’y mettre en valeur Saint-Eloi, saint patron des métallurgistes, particulièrement célébré au sein des nombreuses usines locales à l’époque. Mais au fait, d’où provient l’origine des vitraux dans les églises, mêmes les plus anciennes ? A l’époque de la construction des premières églises, au Moyen-Age, peu de gens savaient lire. Grâce aux vitraux, ils pouvaient connaître la vie des saints. Les vitraux se « lisaient » comme une BD en quelque sorte ! La tradition s’est ensuite maintenue, les vitraux apportant aux lieux, une lumière adoucie propice au calme et au recueillement.

Auguste Adolphe Labouret est né à Laon en 1871, décédé à Crozon en Bretagne, en 1964.  Inscrit aux Beaux-Arts, il suit également les cours de l’Ecole du Louvre, avant de s’installer maître-verrier à Paris, où il excelle également dans l’art de la mosaïque. En charge de contrôler l’état des vitraux des grandes églises de Bretagne, il les restaure également et réalise de nombreux vitraux dans la région. Il innove un nouveau procédé : le vitrail en dalle de verre cloisonné en ciment en 1933, il déposera même un brevet en France mais aussi en Suisse, Belgique, Angleterre, Allemagne. Il réalisera également plusieurs mosaïques pour la basilique Ste Anne de Beaupré au Canada. En France, ses créations en mosaïques ou ses vitraux en dalle de verre ornent ou ont orné des endroits aussi divers et prestigieux que le paquebot Le Normandie, les Galeries Lafayette Haussmann, le Bon Marché à Paris et bien sûr, la chapelle St Eloi.

On peut découvrir ces vitraux les jours de culte et lors d’ouvertures exceptionnelles comme c’est le cas pour les Journées du Patrimoine.

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